
L’art de la chaussure
La couverture de L’Art de la chaussure.
Objet nécessaire de la vie quotidienne auquel les contemporains ne s’intéressent guère que par souci de confort et d’élégance, la chaussure revêt une grande importance pour l’histoire des civilisations et elle n’en est pas dépourvue pour l’histoire de l’art. En perdant contact avec la nature, on a perdu de vue sa signification profonde ; en reprenant contact avec elle, en particulier par les sports, on ne tarde pas à la redécouvrir. Chaussures de ski, de montagne, de chasse, de marche, de football, espadrilles de tennis, bottes de cheval… sont autant d’outils indispensables et qu’on choisit soigneusement, autant de signes révélateurs des occupations ou des goûts. Au cours des siècles, alors que l’homme dépendait beaucoup plus que maintenant du climat, de la végétation, de la nature du sol, alors que la plupart des métiers demandaient la participation du corps, la chaussure avait pour tout le monde l’importance qu’elle n’a plus aujourd’hui que pour quelques-uns.

1567-1320 av. J.-C., Metropolitan Museum of Art, New York.
On ne se chaussait pas de la même façon dans les glaces ou sous les tropiques, en forêt ou en steppe, en plaine marécageuse ou en montagne, pour labourer, pour chasser, pour pêcher. Ainsi donne-t-elle de précieuses indications sur l’habitat et sur les modes de vie. Dans des sociétés fortement hiérarchisées, organisées en castes ou en ordres, le soin de la vêture était déterminant. Princes, bourgeois, soldats, ecclésiastiques, serviteurs se différenciaient aussi par ce qu’ils portaient.

La chaussure met en lumière, moins spectaculairement que le couvre-chef, mais de façon plus astreignante, l’éclat respectif des civilisations, dévoile la classe sociale, la finesse de la race : signe de reconnaissance, comme l’anneau qu’on passe au doigt le plus menu, la « pantoufle de verre » n’ira qu’au pied de la plus délicate des belles. Bien des coutumes l’imposent ou la conditionnent et, par retour, elle nous transmet leurs images. Elle nous renseigne sur les déformations que l’on faisait subir aux pieds des femmes chinoises ; elle nous montre comment, en conservant les bottes inusuelles en Inde, les cavaliers nomades du nord entendaient prouver leur souveraineté sur le sous-continent indien.

Les patins évoquent les hammams ; les babouches, l’interdiction islamique d’entrer les pieds chaussés dans les lieux de culte et les demeures. Parfois elle est symbolique, rituelle, liée à quelque moment crucial de l’existence. On raconte que les hauts talons servaient, ici, à grandir la femme le jour de ses noces pour lui rappeler que c’était le seul moment où elle dominerait son mari. Là, la bottine du chaman était garnie de peaux de bêtes et d’ossements pour faire de celui-ci l’émule du cerf, pour le rendre capable de courir, comme le cerf, dans le monde des esprits. On est ce que l’on porte. Et si, pour participer à une vie plus haute, il faut orner sa tête, dès qu’il s’agit de se déplacer avec plus d’aisance, ce sont les pieds qu’il convient de parer. Athéna porte des chaussures d’or, Hermès, des talonnières. Persés, pour voler dans les airs, va chercher près des Nymphes les sandales ailées.

Musée Carnavalet, Paris. Cliché Ladet, PMVP.
À la haute mythologie répondent les contes. Les bottes de sept lieues qui s’élargissent ou se rétrécissent pour chausser l’Ogre ou le Petit Poucet, leur permettent de parcourir l’univers. « Vous n’avez qu’à me faire faire une paire de bottes, dit le Chat Botté à son maître, et vous verrez que vous n’êtes pas si mal partagé que vous croyez ». Suffit-elle donc à transcender le pied, souvent considéré comme le membre le plus modeste et le plus défavorisé de l’être humain ? Sans doute parfois, mais non toujours. Car le pied lui-même n’est pas toujours démuni de sacré et peut à son tour en communiquer à la chaussure. C’est aux pieds des hommes que se sont constamment jetés ceux qui supplient ou qui vénèrent ; c’est le pied des hommes qui laisse sa trace sur le sol humide ou poussiéreux, souvent le seul témoignage de leur passage. Pièce d’habillement spécifique, la chaussure peut parfois servir à représenter celui qui la portait, qui a disparu, dont on n’ose pas retracer les traits : l’exemple le plus caractéristique est offert par le boudhisme primitif évoquant l’image de son fondateur par un siège ou par l’empreinte de ses pieds.

Boucle en argent rehaussée de cailloux du Rhin. Dépôt du Musée national du
Moyen Âge, Thermes de Cluny, Paris. Musée International de la Chaussure,
Romans.
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