
Salvador Dalí – L’énigme sans fin
Le texte ci-dessous est l’extrait du livre Salvador Dalí (ISBN: 9781783108794), écrit par Eric Shanes, publié par Parkstone International.
Salvador Dalí est, à n’en pas douter, l’un des artistes les plus célèbres du XXe siècle. Son oeuvre explore les domaines universels de l’esprit qui échappent ainsi au temps. La majorité de ses tableaux font preuve d’une maîtrise de la représentation traditionnelle devenue rare de nos jours. Beaucoup des gens admettent qu’ils ont été attirés par l’oeuvre de Dalí à cause de cette maîtrise technique que plus tard, le peintre privilégiera pour pallier le déclin progressif de son art.
Par ailleurs, Dalí a probablement été le plus doué des agents d’autopublicité en ce siècle où, comme l’a remarqué Igor Stravinsky en 1970, la publicité concerne tout ce qui reste des arts » et Dalí, soutenu par sa femme et copublicitaire Gala, s’est montré expert en ce domaine durant la plus grande partie de sa vie.

Salvador Felipe Jacinto Dalí i Domènech est né à Figueres, petite ville de la province catalane de Gérone située dans le Nord de l’Espagne, le 11 mai 1904. Il était le fils de Salvador Dalí i Cusi et de Felipa Domènech. Son père, un notable local respecté, était notaire à Figueres. C’était un homme très vigoureux et l’on dit qu’il avait causé la mort du frère aîné de Dalí, dont le nom était aussi Salvador. Il était né en 1901 et décédé en 1903. Officiellement, son décès était dû à une bronchite et une gastro-entérite, mais Dalí prétendait que la mort de son frère était due à une méningite peut-être causée par un coup sur la tête. La mort de leur enfant laissa les parents de Dalí en plein désarroi ce qui exerça une profonde angoisse sur le jeune Salvador, parce qu’ils projetaient sans cesse sur lui le souvenir du frère décédé, comparant les deux enfants, habillant Salvador avec les vêtements de son frère aîné, et lui donnaient les mêmes jouets et le traitait comme la réincarnation de leur fils défunt et non comme un individu à part entière.

L’esprit de révolte de Dalí le poussait, entre autres actes, à uriner exprès au lit, à simuler des convulsions, à simuler des crises de hurlements ou de mutisme, à se jeter dans le vide de grandes hauteurs et à se livrer à des actes de violence gratuite, tels que précipiter un petit garçon d’un pont suspendu ou bien donner un coup de pied dans la tête de sa jeune soeur sans raison apparente. Dalí compensait aussi la négation de son identité par un comportement exhibitionniste : il se mit une fois une chauve-souris mourante couverte de fourmis dans la bouche et la sectionna presque en deux avec les dents. Il y a sûrement peu de faits avérés dans ces affirmations, mais en fin de compte, la révolte de Dalí et son exhibitionnisme allaient se révéler très utiles dans le domaine artistique.
Les Chefs-d’oeuvre
GUILLAUME TELL, 1930. Huile et collage sur toile, 113 x 87 cm. Musée national d’Art moderne, Centre Georges-Pompidou, Paris
Dans cette peinture, Dalí créa des images irréelles d’unegrande puissance et conviction et elle reste parmi ses travaux les plus dérangeants, pour un spectateur masculin pour le moins. Guillaume Tell, le légendaire archer et patriote suisse du début du XIVe siècle, est supposé avoir gagné un pari en perçant une pomme sur la tête de son fils avec une flèche d’une distance de deux cents pas. La relation entre Tell et son fils était évidemment pertinente pour Dalí en 1930 après que son propre père ait rompu avec lui, bien que le peintre ait changé plus tard l’équilibre du mythe de Guillaume Tell en caractérisant l’archer suisse comme « l’homme dont le succès dépend de l’héroïsme de son fils et de son stoïcisme ».

Dalí a traité ici la relation père-fils d’une manière surprenante : l’illustration affreuse du père sur la droite, jetant des regards sournois, et tenant une paire de ciseaux qui, par leur alignement horizontal avec le pénis exposé de l’homme, suggèrent clairement une castration imminente, et ceci d’autant plus que ces ciseaux se trouvent immédiatement au-dessus d’une fontaine d’où l’eau gicle. Le geste d’invitation de l’homme vers l’autre homme plus jeune à gauche dont les organes génitaux sont masqués, indique clairement qui il veut émasculer, tout comme la dissimulation du visage dans sa main et le geste accusatif avec son autre bras de l’homme plus jeune. En bas à gauche, une image collée d’un nid d’oiseau contenant quelques oeufs introduit les associations de la puissance sexuelle des organes génitaux qui sont masqués par une feuille à côté, et ce masque représente évidemment la notion de castration.
LE VISAGE DE MAE WEST POUVANT ÊTRE UTILIZE COMME APPARTEMENT, 1934-1935. Gouache sur papier journal, 28,3 x 17,8 cm. The Art Institute of Chicago, Chicago
Cette oeuvre, une gouache sur papier journal, attestel’invention et l’ingéniosité du peintre dans son employdes images doubles et composites.

Dans les années 1970, cet « appartement » fut créé au Teatre-Museu Dalí à Figueres par l’architecte catalan Oscar Tunquest sous la direction de Dalí. Le résultat est loin d’être aussi percutant que le projet, avant tout parce que la réalisation en trois dimensions sacrifie la portée imaginaire de l’image alors que la distorsion spatiale prive les composants d’une partie de leur double signification. Pourtant, le canapé qui figure les lèvres de Mae West créé par Dalí en 1936 et dans lequel le rouge à lèvres est représenté par un satin d’un rose criard, transmet la séduction piquante de l’original.
PORTRAIT DE PICASSO, 1947. Huile sur toile, 65,5 x 56 cm. Teatre-Museu Dalí, Figueres
Le jeune Dalí admirait Picasso, mais dès 1947, il s’étaitdéjà retourné contre lui, ce que ce portrait démontre clairement. Le tableau a été peint à l’apogée de la Guerre froide. À cette époque, Dalí était farouchement anticommuniste et, après l’inscription de Picasso au parti communiste en 1944, le détachement de Dalí fut motivé autant par l’action politique de Picasso que par sa suprématie, Picasso qui était depuis longtemps reconnu comme artiste moderne, Dalí considérait que ce rang devait lui revenir.

Nous pouvons déceler ce changement d’attitude envers Picasso dans le second volume de son autobiographies, les Aveux inavouables :
« Picasso est sans doute l’homme auquel j’ai le plus souvent pensé, après mon père. Il était mon phare quand j’étais à Barcelone et lui à Paris. Son oeil était mon critère. Je l’ai croisé à toutes les grandes époques de mon règne. Et quand je me suis embarqué pour les Amériques, une fois encore il était là : sans lui, il n’y aurait peut-être pas eu de billet. Je le considérais comme l’enfant à la pomme regardant Guillaume Tell qui le visait.
Mais c’était toujours la pomme qu’il visait et non moi. Il rayonnait d’une prodigieuse vie catalane. Lorsque nous étions ensemble, l’endroit de la terre où nous nous trouvions devait peser plus lourd et la noosphère prendre une densité particulière. Nous étions les plus forts contrastes pouvant être imaginés et conçus. J’avais sur lui une supériorité : de m’appeler « Gala-Salvador Dalí » et je savais que j’étais le sauveur de la peinture moderne que lui s’acharnait à détruire et qu’il s’appelait seulement Pablo. Moi, j’étais deux et prédestiné. Lui était si seul et désespéré qu’il éprouva le besoin d’être communiste. Il n’a pas cessé de se faire cocu. »
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