Diego Rivera, La Grande cité de Tenochtitlán, 1945, La Renaissance du Muralisme Mexicain
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La Renaissance du Muralisme Mexicain – L’histoire d’un Mexique toujours aussi agitée

Crédit vidéo d’introduction : Vidéo de peinture sur toile de Taryn Elliott de Pexels.

Le texte ci-dessous est l’extrait du livre La Renaissance du Muralisme Mexicain (ISBN: 9781683254935), écrit par Jean Charlot, publié par Parkstone International.

Les peintures murales d’aujourd’hui, imprégnées des traditions indienne, coloniale et populaire, ne sont pas un embrasement accidentel allumé au bûcher d’une révolution. Pourtant, un style national était loin d’être une évidence au commencement du mouvement. En 1920 déjà, des décennies de pression des officiels avaient réussi à étouffer l’esthétique mexicaine, ou tout du moins à l’enterrer profondément dans le subconscient. Quand l’heure fut venue pour les jeunes révolutionnaires de renouer avec leur héritage artistique, ils durent traverser des affres tels des pionniers avançant à l’aveugle, ce qui valu au mouvement son nom de Renaissance.

José David Alfaro Siqueiros, Portrait d’Eve Mayers, 1934, La Renaissance du Muralisme Mexicain
José David Alfaro Siqueiros, Portrait d’Eve Mayers, 1934. Huile sur toile, 92 x 81 cm. Muse de Arte Moderno, Conaculta-Inba, Mexico.

Étudier l’école de peinture mexicaine qui précède l’ère muraliste, tant est-elle imprégnée de tradition indienne, coloniale et populaire, revient à assister à l’éveil d’un langage artistique national peutêtre plus important encore de par la direction empruntée que par ses résultats. Le mouvement nationaliste, destiné à être éclipsé par l’ambitieux groupe muraliste, fut très prodigue pendant la courte période de son règne où il demeura inégalé. Il s’avéra être un outil de premier choix dans l’évolution des goûts d’un public laïc, de la vénération du bon ton européen vers une esthétique ethnique. La Renaissance mexicaine aurait difficilement pu s’épanouir, si l’art mexicain ne lui avait déjà ouvert le passage.

À travers le XIXe siècle nombre de peintures prenaient pour sujet le folklore mexicain, en représentant par exemple des costumes populaires. Les costumbristas, des artistes comme Hesiquio Iriarte et Casimiro Castro, étaient plutôt adeptes de moyens autres que la peinture. Ils nous ont laissé une étude encyclopédique du Mexique du XIXe siècle à travers des albums de lithographies donc certaines colorisées à la main, ainsi que quelques photos, conservées à présent au musée d’histoire de Chapultepec. Et pourtant, prophètes en leur propre pays, ils demeurèrent sans honneur de leur vivant, et leurs oeuvres se fondirent anonymement dans la masse mouvante de la production populaire.

José Clemente Orozco, La Famille, 1926, La Renaissance du Muralisme Mexicain
José Clemente Orozco, La Famille, 1926. Fresque. Escuela Nacional Preparatoria, Mexico.

Cela pris longtemps aux beaux-arts avant de nouer le contact avec le milieu mexicain. Les critiques surent voir plus loin que les artistes, et un leitmotiv parcourt les essais sur l’art au milieu du XIXe, un soupir, que l’art national n’ait encore commencé l’ascension pour être enfin à la hauteur de l’indépendance nationale fraîchement acquise. Quand en 1869 Petronilo Monroy présenta son allégorie La Constitution de 57, une femme volante drapée de voiles pompéiens, les critiques l’admirèrent mais ne manquèrent toutefois de suggérer : « Aussi beau qu’il soit, il n’est pas encore temps pour nos artistes d’exploiter la richesse dormante de nos styles de vie, anciens comme nouveaux. »

Lorsqu’arriva la révolution de 1910, il n’était plus possible d’ignorer le paradoxe qu’était la majorité de ces artistes inconscients de cette fierté nationale qui faisait trembler leur terre natale. Manuel Gamio s’en plaint en 1916 : « Les peintres copient Murillo, Rubens, Zuloaga, ou pire encore représentent des paysages de France, d’Espagne, d’Italie et si besoin de Chine, mais presque jamais ne peignent-ils le Mexique. » « Presque jamais » montre que Garnio était au courant qu’il existait des exceptions à son affirmation. La redécouverte artistique mexicaine avait déjà commencée tandis qu’il prononçait ces mots désabusés.

Diego Rivera, Portrait d’Angelina Beloff, 1918, La Renaissance du Muralisme Mexicain
Diego Rivera, Portrait d’Angelina Beloff, 1918. Huile sur toile, 116 x 146 cm. Museo Dolores Olmedo, Mexico.

En 1907 le jeune peintre de province Jorge Enciso arriva de sa Guadalajara natale pour chercher fortune à la capitale. Que cela soit son but, c’est le journal El Kaskabel qui le suggéra, jurant que l’artiste avait fait ce voyage mémorable agrippé sous un wagon de marchandises, ses photographies roulées dans une taie d’oreiller, sa seule possession.

À cette époque, les plus sérieux des étudiants en art, grisés par les applaudissements d’amateurs éclairés et les idéaux photographiques de Maestro Fabres, s’apprêtaient à peindre des mousquetaires aussi joviaux que ceux de Roybet, des odalisques aussi roses que celles de Gerome et des grenadiers aussi martiaux que ceux de Meissonnier. Méconnaissant cette ambition, Enciso à son arrivée déballa le fruit du travail de sa jeune vie dans le studio de Gerardo Murillo avec lequel il cohabitait et ouvrit bientôt une petite exposition à Calle de San Francisco, n° 3, 4e étage.

Diego Rivera, Nature morte, 1913, La Renaissance du Muralisme Mexicain
Diego Rivera, Nature morte, 1913. Huile sur toile, 84 x 65 cm. Musée de l’Ermitage, Saint-Pétersbourg.

Trois pièces voyaient s’empiler plus de 250 oeuvres, des dessins à l’huile, pastel, fusain et mine de plomb. Sur la couverture du catalogue une gentille China poblana s’inclinait devant son public sur fond de cactus nopales ; vert et rouge sur blanc, les couleurs du drapeau mexicain soulignaient le parfum national. Toutes les images étaient sur des thèmes mexicains et d’une grande simplicité. Des paysages surtout, parfois un simple mur nu ou une maison cubique, avec quelques personnages sans visages accoutrés d’un sarape ou d’un rebozo, le dos tourné, sans savoir qu’ils sont observés. Les titres plantaient l’ambiance : Muse de l’aube, À la messe, Vieille maison. Un succès instantané, le spectacle, grâce à sa simplicité, avait esquinté la prétention du groupe de Fabres, soulevant ainsi la question essentielle d’un art national.

En dehors des paysages contemporains, Enciso relança les anciens thèmes aztèques tels par exemple Les Trois Rois, avec des coiffes en longues plumes de quetzal et des personnages tenant des encensoirs de copal. Ces sujets inspirèrent le poète José Juan Tablada, qui voyait l’artiste et son répertoire indien comme une seule et même entité : « Les yeux d’Enciso sont faits d’obsidienne, étincelants et tranchants tels des flèches de silex trempées dans le feu d’une étoile… Brun et agile tel un archer aztèque, l’artiste ressuscite le prodige de Ilhuilcamina. Des flèches tirées de ses yeux soufflent les étoiles du firmament. »

Diego Rivera, La Peinture d’une fresque représentant la construction d’une ville, 1931, La Renaissance du Muralisme Mexicain
Diego Rivera, La Peinture d’une fresque représentant la construction d’une ville, 1931. Fresque. San Francisco Art Institute, San Franscico.

Enciso fut aussi l’auteur de la première peinture murale au contenu amérindien du XXe siècle. Peinte directement sur le mur de deux écoles, l’une de garçons et l’autre de filles, dans la pas si aristocratique Colonia de la Bolsa, elles furent commencées en décembre 1910 et terminées le 16 mai 1911. Elles furent détruites au cours de travaux de reconstruction des bâtiments. Son autorité tint bon. Après être devenu conservateur des bâtiments coloniaux, l’artiste s’arrêta de peindre en 1915, mais son influence reste l’un des facteurs majeurs de l’art mexicain

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